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4/02/20

Mini abus de droit : l’administration publie ses premiers commentaires…

  • Dans une mise à jour de son BOFIP en date du 31 janvier 2020 (BOI-CF-IOR-30-20-20200131), l’administration apporte des précisions attendues mais finalement décevantes sur les modalités d’application du nouveau dispositif anti-abus à vocation générale institué par la Loi de Finances pour 2019[1] (communément appelé « mini abus de droit ») ;

 

  • Issu de la transposition de la directive communautaire ATAD,[2] ce dispositif applicable aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 portant sur des opérations réalisées à compter du 1er janvier 2020, vise à permettre à l’administration d’écarter les actes passés ou réalisés dans un but principalement fiscal, c’est dire ceux « recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, [qui] ont pour motif principal d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ».
  • Habillement présenté comme visant à assouplir la procédure d’abus de droit classique (destinée à sanctionner les montages ayant un objectif exclusivement fiscal) car n’entrainant pas automatiquement l’application de pénalités, la portée de ce dispositif soulève de nombreuses interrogations notamment quant à la notion de « but principalement fiscal » au cœur du débat.
  • En substance, ces premiers commentaires nous confirment :
    • Que le mini abus de droit s’inscrit dans la stricte continuité de la clause anti-abus générale en matière d’impôt sur les sociétés prévue à l’article 205 A du CGI à laquelle les commentaires de l’administration renvoient pour apprécier la portée du dispositif.
    • Le dispositif ne trouve pas à s’appliquer lorsque la charge fiscale du contribuable ne se trouve pas modifiée. La notion de charge fiscale s’entend ici au sens large et vise autant la réduction d’une charge d’impôt que l’obtention d’un crédit d’impôt ou l’augmentation d’une situation déficitaire.
    • Que sa mise en œuvre est subordonnée à la satisfaction de deux conditions principales :

(i) l’utilisation d’un texte à l’encontre des intentions de son auteur (élément objectif) ; ET

(ii) la volonté principale d’éluder l’impôt (élément subjectif).

Ainsi le mini abus de droit ne s’appliquera pas aux actes dont le but essentiel réside dans l’obtention d’un avantage fiscal (même important) à condition que ce dernier ne soit pas manifestement détourné de son objet.

L’administration illustre ce principe par le cas d’une donation d’usufruit temporaire qui, bien que permettant au donateur de bénéficier d’une économie d’impôt sur la fortune, n’est pas abusive si (i) elle est motivée par la volonté d’aider le donataire à financer (par exemple) ses études et (ii) qu’elle ne prévoit pas de clauses manifestement abusives (donation librement révocable par le donateur).

La référence à l’adjectif « essentiel » est importante tout autant que l’absence de lien direct entre l’importance du gain fiscal et l’existence d’une opération répréhensible (lien que les services vérificateurs ont, de nos jours, la fâcheuse tendance à présumer…).

  • Les commentaires de l’administration précisent par ailleurs que le dispositif ne s’applique qu’aux seuls actes et montages dépourvus de substances économiques… que l’abus de droit classique visait lui aussi à sanctionner (dans des conditions néanmoins bien plus strictes) ;
  • On rappellera en outre que la promesse d’un « mini » abus de droit ayant pour seul objectif d’écarter l’acte litigieux restera illusoire puisqu’il est bien confirmé que l’administration pourra appliquer des pénalités de 40% voire 80% (à l’instar de l’abus de droit classique) au regard de « circonstances de faits et de droit propres à l’affaire considérée»… mais à condition d’être en mesure de le justifier…

[1] La loi 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 et codifié à l’article L64A du Livre des Procédures fiscales

[2] Directive UE (2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur

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