Décryptages
10/04/20
COVID-19 : les mesures d’urgence relatives à la prise des congés et des jours de repos

Face à la pandémie de Covid-19, l’état d’urgence sanitaire a été annoncé ce mardi 24 mars 2020 pour une durée de deux mois.
Parmi les mesures prises, afin de permettre aux entreprises d’adapter leur organisation, l’ordonnance n°2020-323 du 25 mars 2020 permet dorénavant aux entreprises d’imposer, sous certaines conditions, la prise de jours de congés et de jours de repos.
Ces règles dérogatoires portant sur la prise de jours de congés et de jours de repos n’ont vocation à s’appliquer que jusqu’au 31 décembre 2020.
- Congés payés : la voie du dialogue social privilégiée
Concernant les jours de congés, un accord d’entreprise (ou un accord de branche) ouvre :
– la possibilité d’imposer la prise de jours de congés acquis (y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris) dans la limite de six jours de congés.
– le droit de modifier unilatéralement les dates de prise de congés payés acquis.
– la réduction du délai de prévenance (pour la prise de congés ou la modification unilatérale des congés déjà posés) sans qu’il ne puisse être inférieur à un jour franc.
En temps normal, l’employeur définit, après avis du comité social et économique, la période de prise des congés et l’ordre des départs. Il ne peut, sauf en cas de circonstances exceptionnelles, modifier l’ordre et les dates de départ moins d’un mois avant la date de départ prévue (Art. L. 3141-16 du Code du travail).
L’ordonnance n°2020-323 du 25 mars 2020 permet dorénavant à l’employeur d’organiser la prise de congés payés à solder ou en cours d’acquisition pendant la période de confinement, en respectant un délai de prévenance minimum d’un jour franc, à la condition toutefois de négocier un accord d’entreprise, quel que soit son format (avec les Organisations syndicales en place ou à défaut avec le CSE).
En outre, contrairement aux règles de droit commun, l’employeur n’est désormais plus tenu d’accorder un congé simultané à des conjoints ou des partenaires liés par PACS travaillant dans son entreprise, de même qu’il pourra imposer le fractionnement des jours de congés au salarié.
- Comment négocier un accord d’entreprise dans cette période de confinement ?
L’Ordonnance du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement des IRP prévoit, à cet égard, à titre dérogatoire et temporaire, de recourir à la visioconférence, par conférence téléphonique et même par voie de messagerie instantanée pour tenir les réunions du CSE sans limitation du nombre de réunions afin de faciliter la conclusion de ces accords « à distance » pendant cette période de crise sanitaire.
Le Ministère du travail admet sur plan pratique d’envoyer le projet soumis à signature à l’ensemble des parties à la négociation afin que chacune le signe manuellement et renvoie le document par numérisation ou par courrier ou porteur. Il est également prévu que si un même document ne comporte pas toutes les signatures, « l’accord ainsi signé sera constitué de l’ensemble des exemplaires signés par chaque partie ».
Un dépôt de l’accord doit être opéré en ligne en veillant, le cas échéant, à regrouper l’ensemble des exemplaires signés en un seul fichier PDF.
- Jours de repos et RTT : Accord d’entreprise ou Décision unilatérale
Concernant les jours de repos acquis au titre du dispositif de réduction du temps de travail (JRTT), l’employeur a également la faculté d’imposer la prise de jours de repos ou modifier unilatéralement les dates de jours de repos déjà posés avec une plus grande marge de manœuvre puisqu’un accord d’entreprise n’est pas nécessairement requis.
Dans tous les cas, il appartiendra à l’employeur de respecter un délai de prévenance minimum d’un jour franc avant d’imposer la prise des dates des JRTT ou de modifier ces dates lorsqu’ils ont déjà été posés par le salarié.
Ces modalités ont également vocation à s’appliquer aux jours de repos résultant d’une convention de forfait ainsi qu’aux droits affectés sur un compte épargne-temps (CET).
En toute hypothèse, le nombre total de jours de repos dont l’employeur pourra imposer au salarié la prise ou dont il peut modifier la date ne peut être supérieur à dix jours.
L’ordonnance du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement des IRP est venue également sur ce point aménager la consultation du comité économique et social.
Le droit commun prévoit que le comité social et économique est préalablement informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche de l’entreprise : il dispose d’un mois à compter de sa saisine pour rendre son avis.
Afin de garantir l’effectivité et l’efficacité des mesures d’urgence prévues par l’ordonnance du 25 mars 2020, à titre exceptionnel, le comité est informé concomitamment à la mise en œuvre, par l’employeur, d’une dérogation offerte par l’ordonnance du 25 mars 2020, sur :
- le fait d’imposer la prise de jours de repos ou la modification des dates ;
- le fait d’imposer la prise de jours de repos affectés sur le Compte Epargne Temps ;
L’avis du comité social et économique sera rendu dans un délai d’un mois à compter de l’information qu’il a reçue.
Le Ministère du travail précise que l’approbation à l’occasion d’une consultation de l’Instance peut s’opérer via un dispositif électronique de recueil des votes à distance qui respecte les principes électoraux fondamentaux de confidentialité et d’émargement des personnes consultées.
Ces mesures portant sur les jours de congés et de repos constituent une alternative et un préalable recommandé au recours au dispositif d’activité partielle avec lequel la discussion et la négociation sont souvent couplées.
Avocats concernés :