Décryptages
21/11/19
Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, cheval de Troie pour l’intéressement

La prime de pouvoir d’achat, mise en place pour la première fois début 2019 dans le contexte d’une grogne sociale vêtue d’un gilet jaune, sera a priori reconduite pour 2020 (projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 adopté par l’Assemblée Nationale le 19 novembre 2019, article 7). Même si elle est toujours dénommée « prime exceptionnelle », elle devient un véritable outil de la politique de rémunération des entreprises poursuivant la volonté de fidéliser leurs équipes.
Le régime de la prime de pouvoir d’achat n’est pas encore totalement connu.
Pour l’essentiel, il devrait être semblable à celui prévu fin 2018 :
- Le versement devrait être réalisé au cours d’une période limitée dans le temps par le législateur ;
- Le montant de la prime pourrait être modulé selon les salariés en fonction de critères définis par la loi (notamment : rémunération, classification, durée de travail) ;
- La somme serait exonérée d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales dans la limite de 1000 euros par salarié.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 tel qu’adopté par l’Assemblée Nationale le 29 octobre dernier prévoit une condition nouvelle par rapport à ce qui était prévu par la loi du 24 décembre dernier : l’existence d’un accord d’intéressement en vigueur préalablement à la date de versement de la prime aux salariés (seules certaines associations et fondations en seraient dispensées). Le législateur poursuit ainsi l’objectif de généraliser la mise en place des accords de partage de valeur dans l’entreprise enclenché au sein de la loi PACTE. La prime exceptionnelle devient un moyen d’encourager les entreprises à conclure ce type d’accord.
Le régime social et fiscal de faveur de la prime de pouvoir d’achat est en jeu. Sans accord d’intéressement, la prime sera soumise à impôt sur le revenu et charges sociales. Pour aider les petites entreprises à adopter cet accord, les branches sont encouragées à négocier un accord d’intéressement susceptible d’être mis en œuvre directement par les entreprises.
Cette nouvelle condition fait, néanmoins, débat. Plusieurs amendements ont été déposés afin qu’elle soit supprimée. Mardi 19 novembre 2019, la commission mixte paritaire n’est pas parvenue à une position consensuelle. En conséquence, le Sénat entamera en principe, en nouvelle lecture, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 le 30 novembre prochain.
Auteurs :
Frédéric Broud – Associé
Eléonore Dumarski – Avocat
Emeric Jeansen – Maitre de conférence à l’université Panthéon-Assas (Paris II), membre du conseil scientifique du cabinet Racine
Avocats concernés :