Décryptages
9/03/21
La transaction rédigée en termes généraux vaut renonciation à l’indemnité de non-concurrence

Dans une décision du 17 février 2021, la Cour de cassation étend les effets d’une transaction rédigée en termes généraux aux obligations résultant de l’application d’une clause de non-concurrence.
En l’espèce, une salariée dont le contrat de travail prévoyait une clause de non-concurrence a été licenciée ; sa clause de non-concurrence n’a pas été levée. La salariée et son employeur ont ensuite signé un protocole transactionnel afin de régler leur différend.
Le protocole transactionnel était rédigé en termes généraux et prévoyait que :
- l’indemnité transactionnelle avait vocation à réparer l’ensemble des préjudices (professionnels et moraux) en raison tant de l’exécution de son contrat de travail que de la rupture et des circonstances de la rupture du contrat ;
- la salariée déclarait être remplie de tous ses droits et renonçait, en conséquence, à toute action liée à la rupture de son contrat de travail (indiquant n’avoir plus aucune demande à formuler à quelque titre que ce soit).
La salariée a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le paiement de la contrepartie de la clause de non-concurrence ; à cet effet elle faisait valoir (i) que la clause de non-concurrence n’avait pas été levée préalablement à la conclusion de la transaction et (ii) qu’aucune référence expresse à l’obligation de non-concurrence ne figurait dans la transaction.
Au visa des articles 2044 et 2052 du Code civil, la Cour de cassation a affirmé que : « les obligations réciproques des parties au titre d’une clause de non-concurrence sont comprises dans l’objet de la transaction par laquelle ces parties déclarent être remplies de tous leurs droits, mettre fin à tout différend né ou à naître et renoncer à toute action relative à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail ».
La conséquence pour les parties est qu’elles sont automatiquement déliées de leur obligation de non-concurrence :
- l’employeur est dispensé de payer la contrepartie pécuniaire ;
- le salarié n’a pas à respecter son engagement de ne pas réaliser d’acte concurrentiel pendant une période et dans le périmètre fixés par la clause.
La transaction produit un tel effet même si le protocole transactionnel ne précise pas qu’il couvre la clause de non-concurrence. Il n’est pas non plus nécessaire que l’employeur ait expressément levé la clause de non-concurrence lors de la rupture du contrat ni postérieurement.
Cette décision s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel plus général initié en 2014 (et confirmé en 2019) selon lequel la Cour de cassation tend à sécuriser les transactions rédigées en termes généraux dès lors que le salarié reconnaît être rempli de tous ses droits et déclare n’avoir plus rien à réclamer à l’employeur tant en raison de l’exécution que de la rupture du contrat de travail (Cass. Soc., 5 nov. 2014, n°13-18.984 ; Cass. Soc. 20 février 2019, n°17-19.676).
A contrario, si un employeur souhaite mettre en œuvre une clause de non-concurrence alors qu’il conclut une transaction avec un salarié, il aura tout intérêt à préciser dans le protocole transactionnel que celui-ci ne met pas fin à l’obligation de non-concurrence. A défaut, et au regard de cette décision, l’obligation de non-concurrence cesserait de produire effet automatiquement.
Arrêt de la Cour de cassation, Chambre Sociale, du 17 février 2021, n°19-20.635
L’équipe sociale de Racine
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